
Quand on cherche « Franche Montagne » sur internet, on tombe sur un territoire suisse, écrit au pluriel, ou sur une race de chevaux, originaires de Suisse également. Sinon rien, aucune mention de la Franche-Montagne comtoise, cette partie de la région, sise entre les vallées du Doubs et du Dessoubre. Elle tire pourtant son nom des franchises et libertés accordées à ses habitants au Moyen-Âge, renouvelées par l’Empereur Maximilien de Habsbourg. Cette Franche-Montagne, deux villes s’en disputaient le titre de capitale : Saint-Hippolyte, située au confluent du Doubs et du Dessoubre, cité des Comtes de la Roche ; et Maîche, déployée dans les hauteurs, au milieu des collines, défendue par son fier château fort aujourd’hui disparu. Ce nom a peu à peu été délaissé, après la Révolution, mais son souvenir demeure toujours et ce territoire discret et attachant est un formidable terrain de jeu si tu aimes les belles balades natures, le patrimoine oublié de nos jolies contrées rurales.
Nous sommes ici en plein cœur du Parc Naturel Régional du Doubs Horloger, un des endroits que je préfère dans le Doubs. Tout y est beau et bucolique, et on y mange bien ! Dans cet article, je te propose quelques lieux à découvrir dans cette énigmatique Franche-Montagne comtoise.

Balade à Maîche :
son église et son château
Les outrages du temps ont laissé leurs traces à Maîche qui ne compte plus vraiment de monuments à découvrir. Outre ses anciennes halles, abritant aujourd’hui l’hôtel de ville et l’office de tourisme, ainsi qu’une ancienne demeure de la famille Granvelle, il y a tout de même deux sites à ne pas manquer : son église Saint-Pierre et son château du XVIIIe siècle.
POUSSER LA PORTE DE L’ÉGLISE SAINT-PIERRE
Difficile de la manquer, elle trône au cœur de la ville et en demeure le centre névralgique. Quand on entre dans Maîche, on remarque rapidement cette église au clocher atypique : mélange d’un clocher comtois et d’un clocher à bulbe. À l’intérieur, un décor simple mais distingué avec de jolies couleurs.

Fortement endommagée lors des guerres du XVIIe siècle, l’église médiévale se trouvait dans un fort piteux état. Il sera décidé de la détruire pour en reconstruire une à la place. Destin semblable pour la plupart des églises de villages dans le Doubs qui se verront reconstruites au XVIIIe siècle. Celle de Maîche sera terminée en 1760. Dès qu’on a poussé la porte, on est frappé par le côté majestueux de cette église : la grande nef est longue de 42 mètres et haute de 16 mètres. Seul vestige de l’ancienne église, la magnifique chaire en bois sculptée.
Une fourche plantée dans le clocher ? La légende dit que c’est celle du Diable qui, jaloux de la beauté de l’église tout juste achevée, s’employa à la détruire à coup de fourche. L’archange Saint-Michel l’en empêcha et fit fuir le Diable qui, vaincu, abandonna sa fourche dans la pierre. On trouve d’ailleurs dans l’église un autel latéral dédié à Saint-Michel, représenté terrassant le démon.




Maîche et le douloureux souvenir de la Petite Vendée
Une plaque noire, adossée au mur du transept près de l’autel dédié à Saint-Modeste, rappelle un douloureux souvenir, ou quand l’Histoire de France résonne dans les plateaux esseulés du Haut Doubs.
En 1793, la Révolution Française s’éternise et durcit le ton, le régime de la Terreur s’impose. Face aux décisions et mesures prises par la Convention, une partie de la population se soulève en mouvements anti révolutionnaires un peu partout en France, soulèvements qu’on appellera Petite Vendée. La Franche-Montagne connaîtra sa Petite Vendée dont le dénouement tragique trouvera son épilogue devant l’église de Maîche. Française depuis tout juste un siècle, la Franche-Comté rurale se sent encore étrangère dans un royaume qui lui reste encore partiellement inconnu. C’est encore plus vrai pour le Haut Doubs qui, largement isolé des grands axes et des grands centres de diffusion, reste très rural et ancré dans les traditions ancestrales. Les mesures vivant à déchristianiser la société vont être particulièrement mal accueillies.
La plupart des prêtres, privés d’églises et de chapelles, devront célébrer les cérémonies religieuses dans des lieux clandestins dans la forêts ou dans des grottes. Le 5 septembre 1793, les insurgés de 5 cantons de la Franche-Montagne, se heurtent aux forces révolutionnaires, une fusillade faisant une vingtaine de morts éclate à Bonnétage, au lieu-dit Grand Communal. Si certains réussissent à rejoindre les rives du Doubs et passer en Suisse, 494 personnes seront arrêtées : parmi elles, 20 seront déportées en Guyane, 46 seront emprisonnées, 43 seront guillotinées dont 19 à Maîche, devant l’église.
La plaque installée dans l’église, portant le nom des 19 guillotinés de Maîche commémore ces “morts pour la foi catholique”. Une messe est d’ailleurs célébrée chaque année, au cœur de la forêt dans un de ces lieux clandestins, pour honorer la mémoire de ces “martyrs”.



LE CHÂTEAU DE MONTALEMBERT, L’OMBRE DE DE GAULLE
Au Moyen-Âge, Maîche était protégée par un imposant château féodal. Malmené lors de guerres et d’invasions, il sera abandonné par le Seigneur de Maîche en 1524 qui fait construire un nouveau château, au pied de l’église. Ce même château sera encore remodelé au XVIIIe siècle, dans un style néoclassique, pour prendre son aspect actuel.

Mais ce château pratiquement oublié dans les collines de Maîche, entrera dans l’Histoire quand, le 13 novembre 1944, Charles de Gaulle et Winston Churchill s’y réuniront, à la veille de l’offensive d’Alsace, pour discuter de la fin de la Seconde Guerre Mondiale. C’est assez passionnant de marcher dans ce grand salon où l’État Major français s’était réuni, de fouler le même parquet que le Maréchal de Lattre de Tassigny, puis de passer dans le petit salon attenant où de Gaulle et Churchill s’étaient entretenus. Il y a aussi ces fauteuil dans lesquels ils sont se sont assis.




Mais ce château n’est pas seulement le témoin de cette page de l’Histoire du monde, il est aussi l’héritier d’une longue histoire régionale avec ses grandes familles. Fraîchement revenu de Versailles où il avait passé quelques années, le marquis Guyot de Maîche souhaite transformer l’ancien château en une demeure inspiré du faste de la cour. Les chambres sont couvertes de peintures et de tentures, un parquet absolument magnifique est posé, on modernise l’ensemble et on y crée même un jardin à la Française. Accueilli par le propriétaire, héritier de cette grande lignée, on passe de pièce en pièce et on se régale d’une visite passionnante.





Si une telle visite t’intéresse, sache qu’il est possible de visiter le château
mais surtout d’y dormir !
Maîche et la Franche-Montagne :
capitale du cheval comtois.
On dit de Maîche qu’elle est le berceau historique du cheval comtois.
Cette race de chevaux de trait à la robe baie est un des emblèmes de Franche-Comté et de la région de Maîche en particulier.

D’ailleurs, c’est à Maiche que se tient chaque année le Concours International du Cheval Comtois, un concours qui réunit professionnels et amateurs, éleveurs et admirateurs, de cette magnifique race de chevaux. Le Comtois est encore très sollicité pour les tractions lourdes (travaux agricoles, travaux en forêt), mais il aussi été très apprécié dans le passé pour les guerres (de Louis XIV jusqu’à Napoléon), car c’est un cheval robuste qui résiste très bien aux froids et rigoureux hivers comtois.
Si ce beau cheval t’intéresse, tu pourras le trouver dans les environs de la ville. Et sinon, pourquoi ne pas faire une balade en calèche pour aller à la rencontre de ces magnifiques chevaux <3
Église Saint-Michel des Bréseux
et ses vitraux contemporains.
À quelques kilomètres de Maîche, direction Les Bréseux, une petite commune qui possède une petite église intéressante.

Extérieurement, elle ressemble à une église comtoise typique avec son clocher à l’impériale, mais son principal intérêt se découvre une fois la porte passée.
L’édifice possède un exceptionnel ensemble de vitraux réalisés entre 1948 et 1950 par Alfred Manessier. Témoignage remarquable de l’art sacré contemporain, ils ont aussi la particularité d’être les premiers vitraux non figuratifs installés dans une église ancienne en France.




Le toit est fait de lave et les murs sont un mélange de chaux et de poils de vache pour résister aux fortes amplitudes thermiques que connaît la région. Comme dans toutes les églises comtoises, l’entrée se fait par le clocher, un clocher porche du XVIIIe siècle.
Panorama du Faux Verger,
petit havre de paix.
Le Faux Verger est un sommet modeste culminant à 985 mètres et offrant une vue à 360° sur les vallons et forêts du plateau de Maîche. On y accède par une belle route paisible qui traverse la forêt, laisse la voiture devant la belle ferme typique du pays horloger et poursuis à pied. En quelques minutes, la vue se déploie devant toi, il ne te reste plus qu’à t’installer sur le petit blanc de bois et admirer le panorama.

Le rocher du Bourbet,
les grottes et cascades de Waroly.
Allez, maintenant, on va marcher un peu ! Depuis la commune voisine de Mancenans-Lizerne, une jolie randonnée te permet de découvrir deux superbes sites. Petit récit d’une balade pleine de surprises.




Tout commence par une petite marche sous les arbres. Les points de vue arrivent petits à petits, cachés derrière les branches. Le point d’orgue panoramique de cette balade ? Le rocher du Bourbet qui embrasse les paysages verdoyants du Pays Horloger et la vallée du Dessoubre.

Le point de vue n’est pas le seul attrait de cette jolie balade toute paisible : tu vas traverser des petits cours d’eau, tu vas pouvoir admirer les hypnotiques cascades de Waroly et tu finiras par une série de grottes. Décidément, une randonnée pleine de surprises !


Les grottes sont au nombre de 3, elles sont bien indiquées depuis le centre du village de Mancenans-Lizerne. Si la première “salle” est facilement accessible aux randonneurs, les couloirs et autres salles des grottes sont le domaine de jeu des spéléologues.



Église Saint-Antoine de Cernay,
pépite cachée de Franche-Montagne.
Située dans la partie haute du village de Cernay-l’Église, la jolie Église Saint-Antoine est une petite pépite cachée au cœur de la Franche-Montagne. Elle est mon coup de cœur de mon court séjour dans les environs de Maîche. Construite au XVe siècle puis remaniée au XVIIe siècle, l’église Saint-Antoine de Cernay-l’Église abrite un magnifique retable Renaissance.

Construite à la fin du XVe siècle, elle est une des plus vieilles églises de la région encore debout. D’architecture gothique, elle ressemble à un musée d’art sacré avec ses retables et ses statues d’influence champenoise, française, rhénane…
De chaque coté, deux retables baroque attirent le regard : à droite, un retable dédié à la Vierge se pare de tons bleus et dorés. Le tableau représente la Vierge remettant le chapelet à Saint Dominique, quant aux statues de Saint Barthélémy et Saint Joseph, elles sont typiques de l’école allemande du XVIe siècle. L’autel de gauche, dédié à Saint François-Xavier suit les préceptes de l’école rhénane.




Avec ses statues du XVIe siècle, ses fondations gothiques, son retable Renaissance, son autel datant de la Contre-Réforme, son confessionnal du XVIIIe siècle, son étonnante chaire du XIXe siècle, ses vieilles dalles gravées, cette petite église offre à ses visiteurs une magnifique frise du décor religieux depuis le XVIe siècle. La visite est plaisante, apaisante et surtout surprenante.



à Saint-Dominique.





Petite anecdote au passage : la petite commune de Cernay compte parmi ses enfants la famille Bouhélier dont certains fils sont devenus guerriers aux côtés des Comtes de Bourgogne. Parmi eux, Jean-Ferdinand et Alexandre, deux frères dans les armées impériales de Charles Quint, ont contribué à la capture du roi François Ier, grand rival de l’empereur, à la bataille de Pavie en 1525. Pour leur bravoure, ils furent anoblis en août 1533 par Charles Quint lui-même.


Foi, Espérance et Charité. XVIe siècle, école rhénane.
Personnellement, gros coup de cœur pour cette église qui, de l’extérieur, ne laisse pas présager un si beau trésor. Comme quoi, il est parfois intéressant de pousser les portes des églises de nos villages, même les plus reculés.
Franche-Montagne : côté pratique.
Cet article ne présente qu’une petite partie de la jolie Franche-Montagne. Une prochaine fois, je t’emmènerai dans les ruelles de Saint-Hippolyte et des les splendeurs secrètes du Clos du Doubs. Mais si tu désires rester dans les environs de Maîche, voici quelques adresses pour rendre ton séjour agréable.

QUAND VENIR EN FRANCHE-MONTAGNE ?
Si la région se prête à une découverte toute l’année, mes saisons préférées sont le printemps et l’automne. Le printemps pour la fougue d’une nature renaissante, les fleurs partout dans les champs et la belle couleur des paysages. L’automne pour le charme des paysages enflammés par les teintes orange et rouge, pour les sous-bois paisibles et pour l’ambiance douce.
OÙ MANGER DANS LES ENVIRONS DE MAÎCHE ?
Dans le secteur de Maîche, je te suggère deux adresses coup de cœur où tu pourras déguster une cuisine bistronomique et gastronomique.
AU COIN DU BOIS
Installé à Mancenans-Lizerne, à côté de Maîche, cette bonne adresse est parfaite pour une cuisine savoureuse avec de bons produits locaux.
L’ETANG DU MOULIN
Adresse incontournable : un cadre idéal au bord d’un étang et deux restaurants : un bistronomique et un gastronomique. Une super adresse.
OÙ DORMIR DANS LES ENVIRONS DE MAÎCHE ?
J’ai eu l’occasion de tester deux adresses pour dormir dans les environs de Maîche. En premier lieu, je te propose l’hôtel restaurant L’Etang du Moulin : je t’en parle ci-dessus. Outre ses deux délicieux restaurants, l’établissement compte un espace bien-être et des chambres confortables. Un lieu très calme, parfait pour se détendre. Sinon, je te propose le Château de Montalembert. Plusieurs chambres simples mais confortables. Dormir dans ce décor, c’est franchement pas mal. Accueilli par le propriétaire, c’est l’occasion d’une discussion passionnante.






Tu connais Maîche et la Franche-Montagne ?
Tu aimerais venir découvrir cette charmante région ?
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